Biocénoses des fonds durs du circalittoral - Manche - Mer du Nord

Publié le 15 mai 2020 — Modifié le 5 juin 2020

Caractéristiques et état écologique - Manche - Mer du Nord / État biologique / Caractéristiques biologiques - biocénoses

Biocénoses des fonds durs du circalittoral 

Auteurs : Yves Vérin, Sandrine Vaz et Frank Coppin (Ifremer, Boulogne-sur-Mer). Avec la participation de Jean-Paul Delpech, Kélig Mahé (Ifremer, Boulogne-sur-Mer), Pierre Petitgas (Ifremer, Nantes), Nicolas Bez (IRD, Sète).

Les biocénoses des fonds subtidaux rocheux sont réparties au sein de deux étages (figure 1, Annexe 1) :

  • l’étage infralittoral, caractérisé par les algues photophiles (laminaires, cystoseires…). Il peut dépasser ‑30 m C.M. en mer d’Iroise, être limité à quelques mètres ou disparaître totalement dans les eaux les plus turbides. L’infralittoral supérieur correspond à la ceinture à laminaires (ou autres grandes algues brunes) denses (≥ 3 pieds·m-2) ; l’infralittoral inférieur correspond à la ceinture à laminaires (ou autres grandes algues brunes) clairsemées (< 3 pieds·m-2).
  • l’étage circalittoral est marqué par la disparition des algues photophiles et un développement des espèces animales (la limite circalittoral côtier - circalittoral du large correspondant à la fin des algues dressées).

La figure 1 montre bien que la répartition bathymétrique des ceintures est très variable d’un site à l’autre. Dans les milieux très turbides, la tranche d’eau où peut s’effectuer la photosynthèse est réduite et les peuplements infralittoraux photophiles tendent à disparaître ; dans ce cas, les espèces circalittorales peuvent remonter, parfois jusqu’à quelques mètres seulement du médiolittoral. On peut aussi faire le constat de l’absence de certaines ceintures sur bon nombre de sites. En effet, les profondeurs atteintes sur ces histogrammes correspondent aux profondeurs atteintes par les scientifiques en plongée : quand le transect devient trop long ou que le sédiment vient tronquer la limite inférieure d’une ceinture, la profondeur retenue est alors la limite maximale observée. La façade Manche-Atlantique, réunissant les trois sousrégions marines Manche-mer du Nord, mers celtiques et golfe de Gascogne, présente une grande variété de conditions environnementales en raison de son étendue, de sa géomorphologie et de la topographie de ses fonds.

Peu profonde, la Manche est caractérisée par des conditions marégraphiques et hydrographiques particulières, avec notamment des marnages et des courants de marée qui varient fortement. Le découpage du littoral induit des renforcements des courants de marées au niveau du détroit du pas de Calais, de la côte nord du Cotentin, du golfe Normand-Breton, des côtes des Abers et du Léon et du raz de Sein, comme le montre l’étude des courants résiduels de marée (figure 2).

La faible profondeur de la Manche et la nature de ses fonds (Annexe 2), où sables fins et cailloutis dominent, couplée à un hydrodynamisme de fond (courant de fond) et de surface (vent, houle) conséquent, induisent une structuration des peuplements benthiques subtidaux, fortement influencée par la turbidité. L’été, à l’entrée de la Manche (dans le sud de la Cornouaille anglaise), une thermocline peut s’installer.

On se trouve dans ce que l’on appelle des « eaux stratifiées », contrairement aux eaux brassées de la partie est (figure 3).

Le substrat rocheux, bien présent dans la partie ouest de la Manche, hormis au niveau du golfe Normand-Breton où il devient plus rare dans la partie est, reste, à l’échelle de cette sous-région marine, largement minoritaire par rapport aux fonds meubles (Annexe 2).

Les biocénoses dominées par les macroalgues se développent à des profondeurs importantes (> 20 m C.M.) dans la partie ouest (pays des Abers : Morvan, Liniou ; archipel des SeptIles : La Barrière ; Les Triagoz,…) tandis que les eaux turbides de la Manche est et de la mer du Nord vont considérablement restreindre leur répartition bathymétrique (0 m C.M. à Wissant) et favoriser les communautés faunistiques (figure 1).

L’acquisition de connaissances sur le domaine subtidal rocheux est complexe et coûteuse. Les échantillonnages réalisés par des plongeurs couvrent des surfaces relativement limitées, tandis que l’utilisation de R.O.V. (Remotely Operated Vehicle) et autres outils vidéo permettent de prospecter des profondeurs plus importantes, au détriment de la précision (identification des espèces, inventaire des différents micro-habitats…). En dehors des campagnes menées dans les années 1960 et des inventaires ZNIEFF-mer menés depuis les années 1970, les données permettant de caractériser les biocénoses subtidales sont assez récentes et offrent peu de recul, même si des informations sur les biocénoses ou des espèces comme les laminaires peuvent être extraites d’études anciennes.

Les données sont ainsi principalement issues des programmes REBENT et DCE et des observations rapportées par les experts et autres opérateurs sollicités (Université de Lille – station de Wimereux et Ecosub).