Extraction sélective de matériaux - Méditerranée occidentale

Publié le 19 mai 2020 — Modifié le 26 mai 2020

Pressions et impacts - Méditerranée occidentale / Pressions physiques et impacts associés / Pertes et dommages physiques

Extraction sélective de matériaux

Auteurs : Frédéric Quemmerais-Amice (AAMP, Brest). Contributeurs et relecteurs scientifiques : Laure Simplet (Ifremer, Brest), Jean-Georges Harmelin (Université Aix-Marseille II).

Comparativement aux sous-régions marines Manche-mer du Nord et golfe de Gascogne, la Méditerranée occidentale ne présente pas actuellement une forte activité d’extraction de matériaux marins.

  • L’impact des dragages portuaires ne semble pas significatif.
  • L’impact sur les communautés benthiques des extractions de sable dédiées aux opérations de rechargement de plage ne semble pas faire l’objet d’études avancées. Les connaissances existantes sur des activités comparables pratiquées sur la façade Manche – Atlantique permettront de dresser une description générale de ces impacts. Se reporter aux contributions thématiques « Pressions et impacts de l’extraction sélective de matériaux marins » des sous-régions marines Manche-mer du Nord et golfe de Gascogne.

Pour la seule région Languedoc-Roussillon, les besoins en sable pour le rechargement de plage sont estimés à au moins 6 millions de m3 d’ici 2020. Il apparaît donc nécessaire d’améliorer la coordination entre les opérations de dragages portuaires et les besoins de rechargement de plage, de sorte que les volumes prélevés dans les ports puissent être réutilisés sur les plages [3] et contribuent ainsi à limiter les volumes prélevés sur des zones naturelles.

Il semble également, et cette observation est valable pour l’ensemble des régions côtières métropolitaines, que de nombreuses opérations de rechargement échappent à un véritable suivi. Les documents consultés aux échelons communal, départemental et régional, auprès des collectivités et des administrations, ne permettent pas d’évaluer les volumes de sédiments utilisés ni leurs origines. L’étude la plus aboutie en la matière a été réalisée en Languedoc-Roussillon et même dans le cadre de ce travail, un nombre significatif d’opérations de rechargement de plage ne disposent d’aucune information sur les volumes et l’origine des sédiments utilisés. Une fraction indéterminée de ces volumes provient vraisemblablement de prélèvements locaux réalisés dans le milieu marin.

Il est apparu nécessaire d’envisager un approvisionnement d’envergure pour répondre aux besoins en sédiments pour la gestion du trait de côte. Les premières investigations du projet de recherche opérationnelle BEACHMED ont confirmé l’existence de stock sableux au large, à la limite du plateau continental du golfe du Lion. La zone nommée « APE Sud » située entre 80 et 120 m de profondeur présente des sédiments dont la granulométrie est compatible avec les besoins des rechargements.

Sans préjuger de l’issue de ce projet, on peut raisonnablement penser que l’extraction de sables devrait significativement augmenter dans les années à venir. L’évaluation des enjeux écologiques et les études d’impacts préciseront les modalités des opérations d’extraction, qui, au vu des besoins, devront nécessairement produire des volumes conséquents, de l’ordre de plusieurs millions de m3.

Concernant les impacts écologiques, les connaissances acquises en Manche font notamment ressortir qu’après l’arrêt de l’extraction, un retour aux conditions écologiques proches de l’état initial est possible mais doit s’envisager au moins sur le moyen terme, entre plus d’une année et plus d’une dizaine d’années (Tableau 2, figure 1). L’importance des impacts directs et la possibilité de revenir à un état proche de l’état initial sont surtout fonction de l’intensité de l’extraction et de la résilience écologique du site. Il convient donc, comme c’est déjà le cas pour un certain nombre de sites et d’activités, d’aménager les pratiques (intensité, saisonnalité, engins…) pour limiter les impacts directs et ne pas pénaliser les potentialités du site à revenir à un état proche de l’état initial après l’exploitation.

Enfin, il convient d’évaluer l’importance des pertes écologiques d’un point de vue biogéographique et sur le long terme. À l’échelle méditerranéenne, les eaux françaises peuvent jouer un rôle de première importance pour le maintien des populations de corail rouge, emblématique de Méditerranée. Même en l’état actuel de l’activité, qui est très limitée en France, la rentabilité de la récolte du corail rouge est vouée à diminuer de plus en plus. À moins d’avoir recours à des robots sous-marins téléopérés, ce qui serait très préjudiciable au maintien des populations, les conditions de pêche en scaphandre autonome seront inévitablement de plus en plus dangereuses et incertaines. Pour ne pas affecter irrémédiablement la résilience des populations de C. rubrum, il conviendrait d’encadrer plus finement l’activité. Cet encadrement doit bien évidemment s’adapter aux conditions locales. Ils pourraient s’agir de la création de zones interdites à la récolte, notamment pour la régénération de grandes colonies dans les siècles à venir, de l’extension de l’interdiction de pêche entre 0 et 50 m de profondeur à l’ensemble des côtes continentales et de la fixation de quotas de débarquement et de limite de taille et de diamètre des colonies prélevées.