Biocénoses des fonds meubles du bathyal et de l'abyssal - Méditerranée occidentale

Publié le 19 mai 2020 — Modifié le 26 mai 2020

Caractéristiques et état écologique - Méditerranée occidentale / État biologique / Caractéristiques biologiques - biocénoses

Biocénoses des fonds meubles du bathyal et de l'abyssal 

Auteurs : Marie-Claire Fabri, Laura Pedel (Ifremer, La Seyne sur Mer). Avec la participation de Christophe Fontanier (Université d’ Angers), Laurence Guidi-Guilvard (LOV).

En bordure du plateau continental, sur la pente et le glacis, des sédiments grossiers terrigènes sont transportés par les courants de turbidité et les avalanches sous-marines. Plus on s’éloigne de la marge continentale, plus le sédiment est constitué d’accumulation de squelettes d’organismes planctoniques qui recouvrent le fond de la plaine abyssale.

D’une manière générale, la quantité de matière organique alimentant les profondeurs sous-marines est faible. Ce phénomène est d’autant plus marqué en Méditerranée, mer oligotrophe et chaude, où presque toute la matière organique serait consommée avant même d’atteindre le fond. Il est ainsi possible qu’en Méditerranée la répartition des organismes ne soit pas influencée par la profondeur mais par la distance à la côte. Le long des pentes, la biomasse en poids sec des organismes benthiques oscille entre 10 et 20 g·m-2, alors que sur la plaine abyssale elle avoisine les 2 g·m-2.

Cependant, bien que les communautés animales du domaine profond aient une faible biomasse, elles sont très diversifiées. L’une des plus grandes études menées sur les pentes continentales tendrait à suggérer que la plus grande biodiversité marine réside dans les sédiments des grands fonds. Ainsi, la biodiversité benthique profonde ne serait pas inférieure à celle des zones côtières, mais nécessiterait plus d’investigation.

Sur et dans ces vases vivent différentes catégories de faune que l’on classe par taille. Plus les organismes sont petits, plus ils sont nombreux pour une même surface et plus la diversité est importante.

Dans cette contribution, les termes communautés et biocénoses sont considérés comme des synonymes, tels que définis par Dauvin et le terme « faciès » fait référence à l’aspect d’une population qui domine à un endroit précis sous l’action de conditions abiotiques particulières.

Mégafaune : La mégafaune est la faune visible sur vidéos. Elle est répartie de façon éparse sur les fonds meubles, la densité est de quelques dizaines à quelques milliers d’individus par hectare.

À la surface du sédiment, la faune est principalement (60 à 80%) constituée de déposivores tels que les échinodermes : holothuries, échinides, astérides. À proximité de la pente continentale, là où la profondeur est plus faible et l’hydrodynamisme plus important, les particules alimentaires sont remises en suspension par les courants. Les suspensivores qui s’en nourrissent peuvent devenir dominants, accompagnés par des carnivores passifs : éponges, cnidaires. Les fonds habités sont sujets à une forte bioturbation et couverts de traces laissées par le déplacement ou l’empreinte d’animaux à l’arrêt, mais aussi de terriers et tumulus.

Macrofaune : la macrofaune a une taille comprise entre 2 mm et 500 à 250 µm, et une densité de quelques dizaines à quelques milliers d’individus par m². Elle est dominée par les annélides polychètes, qui constituent 50 à 75 % de l’effectif total. Le reste de la macrofaune est constitué de crustacés péracarides (amphipodes, isopodes, cumacés, tanaidacés), de mollusques (gastéropodes, bivalves et scaphopodes) et d’un assortiment d’organismes vermiformes, comme les némertes, les priapuliens, les siponcles ou les échiuriens.

Ces dernières années, l’intérêt pour l’utilisation d’indicateurs benthiques pour évaluer l’état de l’environnement marin a fortement augmenté et la macrofaune benthique a fait l’objet d’une grande attention dans le domaine côtier. Le compartiment « macrofaune benthique » présente plusieurs avantages, notamment celui d’être relativement peu, voire non mobile et donc utile dans l’évaluation des perturbations physiques ou chimiques. La macrofaune peut ainsi être classée en différents groupes d’espèces selon leur sensibilité à l’enrichissement en matière organique, leur groupe trophique ou encore leurs traits biologiques, ce qui permet de prendre en compte la diversité fonctionnelle et les relations entre les assemblages faunistiques [6]. Différents indicateurs existent, chacun avec ses spécificités pour répondre à des questions précises.

Méiofaune : la méiofaune, comprise entre 1 mm et 40 µm, a une densité de 3 à 100 ind.·cm-2. Elle est principalement constituée de nématodes, de petits crustacés (copépodes harpacticoïdes et ostracodes) et de protistes comme les foraminifères.

Les petits métazoaires benthiques peuplent les premiers centimètres du sédiment. Ils jouent un rôle capital au sein des réseaux trophiques benthiques, en participant d’une part au recyclage de matière organique particulaire, d’autre part à la nutrition de la macrofaune et des stades juvéniles de nombreux poissons. La méiofaune est ubiquiste, abondante et se caractérise par une extraordinaire diversité spécifique, particulièrement en milieu profond. Du fait de sa petite taille, de son métabolisme élevé et de cycles de reproductions courts, elle répond très rapidement aux variations de l’environnement et se prête de ce fait particulièrement bien aux études d’impacts.

Les foraminifères benthiques (protistes) constituent quant à eux un groupe de bio-indicateurs marins exceptionnels. Dans les environnements marins profonds actuels, leur dynamique spatio-temporelle est tributaire de nombreux paramètres, tels que l’oxygénation, les apports de carbone organique, les conditions d’oxydo-réduction du sédiment, l’hydrodynamisme des eaux de fond, les apports sédimentaires et la nature du substrat. Aussi les foraminifères contribuent-ils pour une part importante à la minéralisation du carbone organique détritique. Ils peuvent être, dans certains environnements, les principaux acteurs du recyclage du carbone sédimentaire. Ils sont aussi capables de fixer une très grande partie du carbone organique exporté dans les sédiments sous forme de tests calcaires.